jeudi 10 novembre 2016

J29 | St Alban - Lasbros | 20,5km

J'en profite pour dormir tard, pour récupérer de la veille. J'ouvre les rideaux, il neige. Je me recouche.

Je quitte le gîte sous une belle éclaircie, après m'être régalé des confitures maisons disponibles dans le frigo du gîte. Je fais une halte dans l'église du village où j'y allume une bougie.

Le chemin se perd rapidement entre bosquets et prairies. Ces dernières sont occupées par les vaches de l'Aubrac, réputées pour leur viande notamment. Elles ont les yeux noirs, et le pelage d'un brun clair gracieux.
Juste avant de quitter le village, je suis informé que 3 espagnols me devancent. En effet, je constaterai plus tard 3 traces distinctes aux rares endroits du chemin où la neige persiste.
Je vois aussi beaucoup de Pottocks; ces puissants cheveaux de trait à la crinière blonde. Je me sens en bonne forme physique, les jambes légères.

Après une douzaines de kms, le vent se lève, et il commence à neiger. D'abord, il tombe des flocons de forme sphérique, denses, lourds. Ensuite, ce sont de beaux cristaux qui viennent recouvrir le chemin d'un manteau blanc uniforme. On ne voit pas au delà de 40m, et l'averse neigeuse s'intensifie, avec le vent qui va avec. Rapidement, je marche dans 5cm de poudreuse. Je me transforme en bonhomme de neige, excepté pour mes jambes. J'étais dans un bon rythme avant qu'il ne commence à neiger, donc je n'ai pas froid. C'est que du bonheur de marcher dans cette neige! Je pense à toutes les personnes qui apprécieraient ce moment autant que moi et qui sont probablement en voiture ou dans un bureau.
L'averse cède la place aux éclaircies. Le blanc de la neige qui recouvre les sapins tranche avec la couleur brun-orange du tronc, et le vert foncé des épines.

Les chaussures ont percé, donc je ne m'arrête que 5 minutes pour manger une mandarine et un morceau de cochonaille. Je suis récompensé, puisque j'aperçois un bambi à 100 mètres! Il m'a repéré, se fige pendant 2 secondes, puis détalle dans le bois.
Je me suis refroidi, donc j'accélère le rythme jusqu'au gîte.

Qui est-ce que je vois au gîte, les espagnols. Trois amigos, la cinquantaine, qui ont fait toutes les routes connues d'Espagne qui mènent à St Jacques, et qui maintenant s'attaquent à la France. Le premier, Alejandro, a passé 13 années de sa vie à conduire des gens pressés d'un bout à l'autre de la ville de Madrid, avant de partir ouvrir uno Albergue sur le Camino del Norte avec sa femme et ses enfants!Le second, Roberto Córdoba Asensi, était cycliste pro et a couru aux côtés d'un grand coureur belge dont j'ai oublié le nom, au tour de France ou d'Espagne. Le troisième, Ravi, connais pas, inconnu au bataillon.
Je sais tout ça grâce à Alejandro, le seul à parler anglais. La barrière de la langue est frustrante, car les deux autres ont l'air super sympas aussi. ça me motive à me mettre à l'espagnol!
Ces 3 saisis du slip ont marché 40 bornes hier, 38 aujourd'hui, et 32 demain. Ils marchent avec des chaussures qui ressemblent à des chaussures de course à pied.
Danielle, proprio, arrive. Elle fait comme chez elle et met tout le monde à l'aise. Elle m'explique que cette maison est une maison familiale, construite à l'origine par ses grand parents, elle qui n'est déjà plus toute jeune. Les murs sont faits d'énorme blocs de granite. Ces vieilles pierres du pays, conjuguées aux poutres en bois et au feu de bois qui réchauffe la pièce, donnent un cachet très appréciable à ce salon.
Pendant le repas, Alejandro me confie qu'il est très déçu du rouge qu'il a acheté 6 euros, pensant que ce serait du bon vin. Bienvenue en France bro! Il enchaîne "En Espagne, on trouve du très bon vin pour 4 euros, alors que celui-ci en coûte 6 et est très mauvais". Je me réjouis d'arriver en Espagne.
Pour la petite histoire, il avait été attiré par le label "médaille d'argent". J'ai ouï dire une fois de la part d'un responsable vin au Delhaize (qui du coup avait quitté son costume de vendeur un instant), que ces vins là sont en premier lieu des vins qui se vendent difficilement, et sur lesquels on met une belle étiquette pour écouler le stock. Du marketing quoi. Donc en général, plutôt se méfier des étiquettes.

A 21h, les 3 sobreiros sont couchés. Je sors dehors observer les étoiles. La lune est à moitié pleine. Ou à moitié cachée, on ne va pas entamer le débat. Il fait très froid. C'est le calme absolu. On pourrait croire que tout est mort, alors qu'en fait, tout est harmonie.

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